Histoire
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7 novembre 969Les caravanes menées par Halim Kamar et ses frères sont arrivées à Waha Kamar il y a tout juste deux jours, lorsque Saoussen met au monde son troisième enfant. Lorsqu'on l'interroge sur ce moment parfait pour arriver au chevet de sa femme enceinte jusqu'aux yeux, il dira toujours avec mystère que les Kamar sont des enfants de la lune, comme le dit leur nom, et que ses mères lui ont montré le chemin.
Nour,
la lumière, est un bébé maigrichon et pâlot, qui affichera plus tard le même teint étonnamment clair que celui de sa mère, la belle et digne Saoussen,
le lys du désert. La femme craint plusieurs fois que le bébé ne passera pas la nuit, mais chaque matin, Nour est bien vivante. Elle gardera toujours une silhouette frêle et un appétit d'oiseau, qu'importe les délices sucrés de la cuisine arhabéenne. Ses deux aînés, les jumeaux Nasser et Nassiha, âgés de 4 ans, se prennent d'affection pour l'enfant fragile, chacun à leur façon.
Trois mois plus tard, la mère est remise sur pied et retrouve Halim au coeur du désert, prête à reprendre la route des dunes et des épaves à ses côtés. Dans son giron, les grands yeux noirs de Nour, déjà prêts à tout avaler de ce monde nouveau.
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Décembre 971Naissance de Nezha, soeur cadette de Nour. Cette fois, Halim n'a pas pu se rendre à temps.
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974Naissance de Najd, dernier enfant de la fratrie, deuxième garçon fortement attendu. Les souvenirs clairs de Nour débutent avec le bébé gazouillant et curieux qu'est son petit frère ; Waha Kamar et ses tentes toujours tirées, le goût des dattes et du miel ; le jouet mécanique que lui rapporte Halim lorsqu'il arrive à l'oasis, peu de temps après la naissance de Najd. Un petit chameau articulé qu'elle fera marcher sur les dunes, sous la lueur des lunes.
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977La petite est frêle, mais dégourdie, et est déjà en charge de quelques tâches féminines typiques de celles qui voyagent entre les dunes. Elle envie Nasser alors que celui-ci accompagne leurs cousins dans les pillages qui font la spécialité des Kamar, assigné au chargement des caravanes de tout ce qui est récupéré dans les entrailles des épaves. À la nuit tombée, elle se glisse fréquemment hors de son couchage afin d'aller rejoindre les hommes autour du feu, sa frimousse curieuse dévorant les trésors retrouvés.
Nassiha l'initie à la flûte pour l'occuper (Nour ne sait encore aujourd'hui qu'en tirer que quelques mélodies d'enfant) ; Saoussen la relègue à la surveillance des plus jeunes, afin de l'éloigner des affaires des adultes.
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980La guerre se termine, mais une seconde commence avec l'épidémie qui ravage le continent et emporte quelques membres du clan, ennemi qu'ils ne peuvent pas combattre. La frêle pré-adolescente ne manque pas de caractère et alors que Nasser tente de se faire remarquer pour devenir apprenti de la guilde des guerriers, afin d'un jour défendre le clan pendant leurs fouilles, elle le supplie de l'initier au maniement des armes. L'argumentation est opiniâtre des deux côtés, jusqu'à ce qu'il comprenne que son harcèlement ne prendra jamais fin. Il accepte de lui enseigner comment manier les lames incurvées et ambitieuse avant l'heure, elle manque de s'éborgner seule lorsqu'elle tente en secret de manier son cimeterre. La colère de l'aîné les met en froid pendant quelques difficiles semaines.
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982Halim permet à Nour de l'accompagner sur une première épave, après avoir jugé qu'elle est capable de ne pas se mettre dans le pétrin. Trop heureuse de cette chance, elle est très obéissante et se contente d'effectuer les tâches qu'on lui assigne. Presque rien, pour cette première sortie, mais assez pour que le père soit satisfait de son enfant. Les occasions se répètent de plus en plus, jusqu'à ce que la Kamar soit une incontournable des pillages. Son sens de l'observation est un grand atout et elle s'intéresse beaucoup aux quelques pièges qu'ils croisent, bien qu'elle ne soit pas capable de les désamorcer. Au moins, elle les évite !
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Décembre 984Un mois après son anniversaire, sa famille croise la route d'une mage de leur clan, qui accepte de vérifier si l'adolescente a une quelconque prédisposition magique. Le test est négatif, ce qui arrange bien Nour, et la femme accepte de l'aider à rédiger son courrier de candidature pour l'académie, pour entrer en mécanique. La mage la prévient que son analphabétisme sera un problème pour son admission, mais la nomade chasse l'avis du revers de la main, persuadée que son enthousiasme suffira à la faire entrer.
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Juillet 985L’humiliation est cuisante. L’enthousiasme de Nour pour les études est en effet très apprécié, mais ses lacunes en lecture et écriture, pour ne pas dire son absence quasi totale de connaissance dans ces domaines, l’empêchent d’intégrer l’académie. Elle n’ose pas retourner en Arhab pour annoncer le refus à sa famille, qui profiterait de l’occasion pour la ramener dans son giron, en lui serinant doucement qu’il ne fallait pas trop de faire d’espoir. La Kamar se trouve une chambre dans la Ville Basse de l’Ancrage, qu’elle paie en proposant ses services de traduction en arhabéen à la police de la ville. Le temps de réfléchir à un plan.
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Septembre 985L'académie lui offre de suivre un tutorat en lecture et en écriture avec une étudiante plus âgée de l'académie, afin de préparer sa deuxième inscription. L'élève en question, Hiéranie Coursevent, est une future savante Ansemarienne : un mélange intrigant ! Les deux jeunes femmes se lient rapidement d'amitié autour de leurs leçons, qui dérivent bien souvent de la lecture et de l'arhabéen jusqu'au savoir, leur passion commune.
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Juillet 986Au deuxième entretien, Nour est cette fois acceptée, à la condition de débuter les cours au mois d'août, afin de finaliser sa mise à niveau. Encore aujourd'hui, sa main d'écriture est peu gracieuse, le crayon et la plume peu naturels entre ses doigts, mais ses efforts ont payé. Elle intègre le cursus de mécanique, rare femme parmi les étudiants, et encore plus rare Arhabéenne.
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987La jeune savante intègre le club des inventeurs. Son esprit pragmatique la rapproche davantage des Abysséens, alors que l'imprévisibilité cielsombroise la laisse de marbre. Parfois un peu inquiète, aussi, lorsqu'elle les voit s'affairer sur des modèles et mécanismes qui ne devraient absolument pas fonctionner, mais qui fonctionnent malgré tout. À l'été, sa soeur Nassiha convole en justes noces avec un Zayan de la savane, trouvant dans la sédentarité une rassurante sécurité.
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989Fin de son premier cycle d'études en
juin ; Nour reste à l'Ancrage pour son apprentissage, mise sous la tutelle d'un mécanicien, Charles Brûle-Pourpoint, qui travaille sur les mystérieux carrousels de la cité des empereurs-mages. Elle est ravie d'enfin voir de près les mécanismes de ces constructions fascinantes, si différentes de ce qu'elle a pu observer dans le désert... et à la fois étrangement semblables. Cet instinct bourgeonnant est mis en veilleuse dans son esprit, pour l'instant, et ne se réveillera que bien plus tard.
En
octobre, la brune est de corvée de nettoyer les manèges de tous les nids d'oiseaux (et les fientes qui en découlent, appétissant) qui y ont été construits, une tâche aussi salissante que déprimante, mais nécessaire à l'entretien. Sa petite constitution en fait l'élément parfait pour accéder aux endroits les plus étroits comme les plus élevés. C'est perchée en haut d'un carrousel qu'elle fait la rencontre de Hyacinthe, son familier, un toucan toco curieux arrivé à l'Ancrage par ses propres moyens depuis la jungle de Déméria. Deux âmes nomades qui se reconnaîtront aussitôt et ne se quitteront plus.
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991Lorsqu'elle termine son deuxième cycle en
juin, Nour est à la fois attristée de quitter l'Ancrage, son monde depuis les six dernières années, et heureuse de retourner en Arhab pour de bon. Là-bas, elle y retrouve son clan et son expertise en mécanique en fait un élément-clé de plusieurs expéditions dans les ruines retrouvées dans les sable. Enfin, ça, c'est ce qu'elle souhaite : la vérité, c'est que la frêle savante doit souvent argumenter avec ses cousins pour avoir le droit de rejoindre les expéditions, chacun s'obstinant jusqu'aux petites heures. Son droit de s'infiltrer dans les temples pour en analyser les pièges, identifier les mécanismes retrouvés et élaborer diverses façons de contourner les problèmes, elle se l'arroge avec fureur, son diplôme de l'académie brandit comme une lance.
En fin d'année, lors d'une expédition, elle retrouve avec plaisir sa chère Hiéranie. Celle-ci lui partagera au fil du temps ses questionnements à propos de la jungle, et pour une fois, le si bavard Hyacinthe ne trouve rien à leur dire à ce sujet.
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993Sa mère lui « présente » Shayaan, un lointain cousin Sadaqa du même âge qu'elle. La savante devine bien les intentions de sa génitrice à son égard, mais le caractère indépendant et les dangereuses ambitions de Nour (crapahuter dans des ruines décrépies au coeur de pièges mortels) en font une future épouse bien peu idéale pour l'homme.
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Février 994L'expédition au Palais des Soupirs - la première, à tout le moins - laisse un souvenir aussi amer qu'indélébile dans son esprit. Elle et Hiéranie ont fait des pieds et des mains afin de pouvoir y entrer, malgré les réticences de ses compères arhabéens, et Nour accuse durement le coup lorsque la vouivre blesse gravement Ardashir Sinhaj et emporte l'un des guerriers, en plus de blesser l'un de ses cousins et elle-même. Elle se sent responsable de la tournure des événements et s'en veut terriblement ; les cicatrices d'argent qui traversent sa poitrine, cruelles, un rappel éternel de son imprudence.
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Mai 994Remise de ses blessures, la Kamar a aussi besoin de changer d'air, et pour cela, quoi de mieux que de littéralement quitter le continent ? Elle retourne à l'Ancrage, dans le giron de son mentor, pour lequel elle s'occupe pendant quelques mois de prendre soin des carrousels. Même les tâches les plus abrutissantes lui font du bien... jusqu'à ce qu'elle se penche à nouveau sur les croquis tirés de leur aventure au palais. Charles réussit à lui dégoter une autorisation auprès de l'académie pour accéder à la bibliothèque et y consulter quelques plans et volumes qui y sont soigneusement conservés. Il lui fait également une recommandation afin de rejoindre la guilde des inventeurs, ce qu'elle a toujours évité auparavant : elle y retrouve des esprits foisonnants qui alimentent ses propres réflexions et font resurgir son instinct curieux, rallument la flamme en elle. Elle n'est pas inventrice de métier, mais ses talents en mécanique, son intérêt envers les créations des empereurs-mages et sa débrouillardise en font une recrue digne d'intérêt.
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995Son séjour palatin calme son esprit agité et c'est bien plus sereine qu'elle revient en Arhab. Elle se laisse même brièvement prendre au jeu de sa mère, lorsque celle-ci lui présente un nouveau parti - un charmant Qoraïch que son esprit frondeur ne rebute pas, mais leur aventure ne les mène nulle part. Nour n'a que ses mécanismes dans le coeur et dans la tête.
Le prétendant s'entiche ensuite de sa douce Nezha et ils seront mariés trois ans, se laissant ensuite sans animosité, le petit Jibran dans les bras de la mère.
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997Après des mois à cajoler ses frères Nasser et Najd (ce dernier devenu guide pour les caravanes de voyageurs), ceux-ci acceptent de l'accompagner pour une seconde expédition au Palais des Soupirs. Uniquement à son entrée, là où ils pourront s'enfuir facilement ! Le trio Kamar ne croise pas de vouivre, cette fois-là, ni l'un de ses petits, et Nour réussit à recopier parfaitement toutes les inscriptions qui parsèment les murs du palais dans la section explorée. Les glyphes lui rappellent étrangement ceux retrouvés par Hiéranie. Lorsqu'elles comparent leurs trouvailles, au détour de leur correspondance, elles ne peuvent que se rendre à l'évidence : ça parle de jungle, en Arhab, et c'est plus qu'inhabituel.
En
mai, elle fait partie du groupe de caravanes qui vient au secours de l'Audacia, littéralement tombé des cieux jusque dans les dunes. C'est la première fois qu'elle a l'occasion de mettre les mains sur cette merveille qui allie magie et savoir et elle envie grandement celle qui s'occupe de réviser entièrement le fantastique engin. La croisière offerte en récompense est un souvenir précieux à son coeur, dont Nour narrera le déroulement avec passion à Hiéranie.
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998De
janvier à avril, un contrat publié par la guilde des inventeurs la fait voyager quelques mois à Euphoria, afin de vérifier le bon fonctionnement du manège en place au coeur des mois d'hiver. Son expertise des carrousels en fait la personne idéale pour ce travail. Elle ressort de ce séjour traumatisée par la gastronomie (infecte), leur hiver (glacial), les moeurs (délurées) et leurs exploits (délirants) en matière de technologie. Heureusement, au coeur du peuple de l'Esprit, Nour passe pratiquement inaperçue, avec ses cheveux sombres, son teint clair et ses yeux noirs, et les savants des lieux l'autorisent à accéder à des ouvrages très poussés et des plans d'une complexité abêtissante.
L'exploratrice tente tant bien que mal, par la suite, de trouver un financement quelconque pour aller en Déméria. Elle n'a pas la chance de Hiéranie, toutefois, et toutes ses demandes de mécénat tombent à plat. Il n'y a bien que Charles pour la soutenir depuis l'Ancrage et la guilde des inventeurs, qui offre un soutien monétaire potentiel contre un partage de ce qu'elle pourrait trouver... si elle trouve quoi que ce soit. La dangerosité inexplorée de la jungle démériane joue en sa défaveur. Ses lettres moroses à Hiéranie sont diluées dans ses conseils rassurants à son amie, lorsque celle-ci s'épanche sur ses affaires amoureuses avec l'une des seigneuresses d'Amarna.
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Juin 1000Recommandée et recrutée par le biais de Hiéranie pour une première expédition organisée dans la jungle de Déméria, Nour accepte l'offre sans même hésiter. Ses appréhensions à l'idée de découvrir cette partie inexplorée d'Arven sont enterrées sous sa hâte et son enthousiasme, sans parler de la fierté d'être parmi les
premières. Parce que l'expédition est entièrement féminine : et vlan, dans les dents de tous !