Les potins des profondeurs

L’imagination populaire se fait tout un tas d’idées sur la vie des assassins du Pas de l’Ombre, tu le sais bien. Vous en riez parfois, Hjalmar et toi, lorsqu’il te raconte les ragots qui courent ici et là : il sait parfaitement que tu portes sur toi la main noire de Lida, que Vassili te l’avait transmise, tout comme tu l’as offerte à Aubrée. Il sait très bien que sa patrouille est un alibi pour vous deux, ta vaillante apprentie et toi ; mais il sait également que vous êtes l’une et l’autre deux bras vaillants pour défendre Abyme contre la menace qui la guette dans les profondeurs. Il n’en reste pas moins que l’existence que vous menez, ton ailière et toi, ne correspond pas vraiment au fantasme des assassins. Non, vous ne rôdez pas dans les ombres, prêtes à vous gorger du sang des innocents ; non, vous ne sacrifiez pas des bébés sur des autels barbares ; et non, vous ne faites pas la rondes nues avec un seau rempli d’oignons sur la tête. (D’où vient cette rumeur, par tous les dieux ?) Vous patrouillez, voilà : quand il n’y a pas de client à rencontrer ni de contrat à exécuter, vous n’avez pas besoin d’être à la cellule de la Citadelle, alors vous menez votre vie de couverture, dans cette famille de berserkirs et de skjaldmös dont la solidarité  ressemble parfois à la franche camaraderie du Pas de l’Ombre. Rien de bien scandaleux dans cette vie-là !

Par contre, vous potinez. Oh, Comme vous commérez, à longueur de journée, avec les autres membres de votre patrouille ! Il n’y a pas grand-chose d’autre à faire pendant les longues marches dans les Tréfonds abandonnés, tandis que vous traversez ces galeries et ces cavernes à moitié effondrées, sculptées il y a des siècles et rendues aux monstres ; ou pour meubler les trajets effectués avec le train des profondeurs. Surtout quand Arius et Saturnin sont restés ensemble à la Citadelle... Pour l’instant, vos taquineries se dirigent sur la pauvre Octavie : toute rougissante et gênée, elle refuse de vous avouer vers qui son cœur balance, et ton instinct de commère affûté te souffle qu’il y a là anguille sous roche. Qu’elle parle, enfin, la gredine ! Ce n’est vraiment pas drôle ! Toute dans ta râlerie théâtrale, tu te retournes vers l’arrière du groupe, marchant à reculons quelques pas pour apostropher Hjalmar, bras écartés pour mieux le prendre à témoin. « Capitaine ! Octavie refuse de répondre à la question ! Demande-lui, toi ! »

Le sourire en coin de ton aîné adoucit son refus lorsqu’il secoue brièvement la tête. Évidemment, c’est un bon capitaine, ton Hjalmar : il ne va pas mettre en porte-à-faux l’une de ses skjaldmös. Un clin d’œil discret passe entre vous, et tu te remets en marche avant, peu désireuse de percuter une paroi. Bon. Si Octavie, d’un charmant écarlate dans la lueur flamboyante de vos torches, est temporairement sauvée de ta curiosité, peut-être que quelqu’un d’autre aura des rebondissements sentimentaux à exposer au groupe, pour tromper la monotonie de la patrouille ?

C’est donc vers Aubrée que tu tournes un œil inquisiteur. Et elle, alors, qui se fait discrète petite souris depuis que le reste du groupe a commencé à cuisiner la malheureuse Octavie… ?

Tu en es si fière, Ljöta, de ta petite apprentie ! Tu te rappelles encore, comme si c’était hier, du jour de votre rencontre. Elle te semblait si frêle, de prime abord, toute pâle dans ce lit de malade, avec des cernes impressionnants autour des yeux. Fragile, vulnérable, avec une détresse poignante inscrite dans chacun de ses gestes. Tu n’avais pas trop compris pourquoi Hjalmar t’avait demandé, à toi, d’aller lui parler – il y en avait d’autres, des femmes, dans votre patrouille, et des plus compatissantes que toi ! Mais quand elle a dirigé le regard vers toi, tu as compris son raisonnement : c’est vrai qu’elle ressemblait à que Ljära aurait pu devenir, si elle s’était remise de la fièvre qui l’a emportée bien trop tôt. Tu t’es prise d’affection pour elle : pour cette résilience courageuse qui la rendait bien plus résistante que tu ne l’aurais deviné, pour ce sérieux solennel qui prouvait la maturité de ses réflexions. Pour sa détermination farouche qui faisait brûler dans son regard le feu des profondeurs ! Oui, elle t’a rendue fière, cette délicate oiselle surfacienne changée en digne skjaldmö par le passage des ans. Et quand elle a ajouté à son serment de patrouilleuse celui d’assassin, ton approbation n’a plus guère connu de limites. Hjalmar, ton oreille préférée, sait bien à quel point tu t’es attachée à la blonde Abysséenne de conversion. Lui aussi l’apprécie, tu le sais ; et les liens entre patrouilleurs, de toute manière, sont quasiment familiaux par essence.

Octavie fait partie de votre famille des Tréfonds, c’est une certitude – et on se taquine, entre sœurs, entre cousines, c’est bien connu. Protégée par la vigilance de Hjalmar ; et tu te résouds à changer de cible pour tes taquineries. Un regard suffit : immédiatement, Aubrée dresse ses défenses, et c’est l’un des patrouilleurs qui enfonce le clou. Un sourire ravi étire tes lèvres lorsque ta protégée rosit adorablement, et si tu n’avais pas une torche allumée dans la main, tu le sais : tu applaudirais. C’est qu’elle reste quand même pudique, celle qui a grandi en Ansemer dans une famille pudibonde ; et tu te demandes si tes aventures épisodiques la choquaient, au début de votre collaboration. Ce n’est pas une raison pour qu’elle te cache les siennes, par contre : la patrouille se fera un plaisir de faciliter ses escapades romantiques, en cas de besoin, elle le sait bien ! L’attention de tout le détachement est fixée sur elle à présent, et le discret soupir de soulagement d’Octavie ne t’échappe pas. Elle ne perd rien pour attendre, la mignonne – mais pour le moment, c’est Aubrée le centre de la conversation.

« Tt-tt-tt, jeune fille, ne prends pas cet air-là : ça se voit, que tu nous caches quelque chose, on te connaît depuis le temps… ! Allez, quoi, on s’ennuie comme des rats morts, ici, et Hjalmar ne veut pas qu’on continue à embêter Octavie. Il y a forcément quelqu’un, hein… ? Allez, Aubrée, est-ce que je te cache des choses, moi, hein ? »

Et tout ça, du même ton suppliant qu’une gosse de quatre ans. L’un des avantages d’être princesse, après tout, c’est bien de pouvoir donner libre cours à ta caprices, non ? Et tant pis si tu as 30 ans passés !

Elle résiste, la petite skjaldmö, et un sourire nostalgique éclaire un instant ton visage lorsque tu te remémores tout le chemin qu’elle a parcouru. Il y avait déjà en elle à son arrivée dans les profondeurs quelque chose de rigide qui refusait de plier, qui ne voulait pas rompre. Avec les années, cette résilience acharnée a évolué en une opiniâtreté obstinée, certainement liée en partie à ton propre entêtement. Peux-tu vraiment blâmer Aubrée de tenir si fermement ses positions, quand tu l’as toi-même encouragée à toujours maintenir ses opinions ? Dans la terreur des profondeurs, le dernier recours contre l’angoisse est bien souvent la force des convictions, et tu as fait en sorte que ton apprentie puisse toujours se reposer sur les siennes. Qu’elle te résiste aujourd’hui n’est qu’une preuve de plus des progrès accomplis, et tu es fière pour elle du chemin réalisé.

Encore plus qu’elle ose se rebiffer ! Bien sûr, que tu caches quelque chose – même plusieurs choses – tout le monde a ses secrets, au sein des patrouilleurs, et ce qui rend votre unité aussi solide, c’est bien que vous veillez avec soin les uns sur les secrets des autres. Il y a un peu de tout dans la collection de squelettes fourrés au fond de ton placard personnel, mais tu vis avec, comme tous tes frères et sœurs d’armes. Rien d’aussi léger que les confidences que tu tentes d’extorquer à ton ailière favorite, toutefois. Ses sous-entendus pleins de suspicion à ton encontre ne t’en tirent pas moins un sourire rayonnant (oui, tu caches tes amants, il paraît que tu as une réputation à tenir, comme te le serine régulièrement Lidjä d’un air hautement pincé). Un jour, quand elle sera grande, tu emmèneras peut-être Aubrée à la surface : il paraît qu’en Sombreciel, la guilde des compagnes compte à présent des hommes. Idée intéressante, mais l’identité de son mystérieux soupirant te passionne bien plus !

Elle en dit bien trop peu pour étancher ta curiosité, et tu perçois derrière vous les murmures d’intérêt du reste de la patrouille – sauf Octavie, qui sauterait sûrement dans le premier trou de souris croisé pour échapper à tes investigations… ! Pendant quelques secondes, tu restes silencieuse – ton esprit est en train de passer mentalement en revue tous les possibles candidats à cette vague description. Un garçon, a-t-elle dit. Pas un homme. C’est que ton regard est rarement attiré par la jeunesse, alors… Comment la faire parler ? Peut-être en prêchant le faux pour savoir le vrai ? Aussitôt cette idée esquissée, la voilà mise en application. Arrondissant tes yeux dans une expression de surprise outragée, tu glapis en sourdine, dans un pseudo-chuchotement suffisamment sonore pour être entendu à l’autre bout des Tréfonds. « C’est mon frère, hein, c’est ça ?! » Un coup d’œil rapide par-dessus ton épaule te montre que Hjalmar se passe la main sur le visage, secouant la tête avec résignation. « Lia… » exhale-t-il dans un grognement tout aussi atterré qu’amusé, à moitié étouffé par sa main. Un petit rire retenu vient ensuite, et quand il relève le regard, tu y lis tout un océan de méfait : ton complice préféré se joint à la danse ! « Si c’était le cas, je serais peut-être intéressé. C’est qu’elle est adroite avec une arme, ton Aubrée, pour une surfacienne… » ajoute-t-il avec un hochement de tête approbateur.

Ravie que ton aîné se joigne à ta taquinerie, tu reportes un regard triomphant vers la blondinette, à laquelle tu adresses une bourrade d’épaule à épaule très amicale. « T’as entendu ? Qui a besoin de soupirer après un garçon quand le plus bel homme des profondeurs est là ! » clames-tu d’un air guilleret. Un cortège de rires discrets résonne derrière vous, le reste de la patrouille manifestant son amusement devant tes pitreries. « Allez, dis-nous. C’est qui ? On le connaît ? » Est-ce qu’il mérite seulement l’attention d’une fille aussi sensationnelle que ta protégée ?

Le glapissement d’Aubrée est tout à fait ce que tu attendais, et tu ne peux retenir un fou rire enchanté, très peu digne d’une princesse, mais libérateur et tout à fait sincère. « Elle proteste bien fort, ton ailière, Lia ! » entends-tu derrière toi entre deux rires d’un de vos plus expérimentés berserkirs, et l’hilarité du groupe ne fait que redoubler. Pauvre petite Aubrée, quand même ! Elle est si mignonne quand elle rougit que tu ne peux t’empêcher d’en provoquer quelques occasions : c’est ainsi que tu aurais été avec Ljära, si elle avait vécu, et tu sais que Hjalmar partage ta tendresse fraternelle pour la jolie surfacienne tombée dans les tréfonds. Et même s’ils n’en parlent pas explicitement, tu as bien compris également que le reste de la patrouille est tout aussi protecteur d’une des leurs. En Abyme, on chérit les femmes comme des trésors ; et ce n’est pas parce que celle-ci a vu le jour en surface qu’elle en est moins précieuse ! Quiconque voudrait s’en prendre à Aubrée devrait d’abord triompher de chaque berserkir et de chaque skjaldmö de votre petite troupe – et ensuite, avoir le dessus sur la blondinette elle-même, devenue plutôt redoutable une lame à la main. Et si jamais, un jour, un garçon s’avisait de la faire pleurer… Qu’il apprenne à courir vite !

Trêve de sanglantes rêveries de punition et de vengeance sur un air de massacre – ta protégée a cédé ! Elle parle, et les rires se sont tus : tout le monde l’écoute avec grande attention, gravant chaque détail là où l’on pourrait s’en rappeler aisément, cherchant à deviner l’identité de l’heureux élu. S’il est à la Citadelle, vous l’avez sûrement déjà croisé ; peut-être même que l’un d’entre vous le connaît ! Ce qui expliquerait la réticence d’Aubrée à dévoiler trop de détails significatifs… Tapotant ton menton d’un doigt pensif, poursuivant ta marche dans la pénombre des tréfonds, tu réfléchis intensément au fur et à mesure des explications. Tybalt, dit-elle ! Ce n’est pas vraiment un prénom d’ici, ça… Est-il démérian ? Serait-ce excessif que d’envoyer une missive à la Citadelle demandant aux assistants de Lidjä si des ressortissants de Déméria sont à la capitale en ce moment ? « N’y pense même pas. » chuchote la voix de Hjalmar à ton oreille, la main sur ton épaule, du petit ton amusé de celui qui sait parfaitement que tu étais sur le point d’abuser de ton rang pour obtenir un rapport complet sur le jeune homme concerné, remontant à six générations. « On lui dira rien. » promets-tu d’un ton catégorique à Aubrée, dont tu as très bien perçu l’angoisse ; et les autres acquiescent, tout autour de vous, jurant de garder le secret d’une des leurs comme si c’éait celui de chacun d’eux. Tu es fière, de cette cohésion des patrouilleurs que Hjalmar a su instaurer dans sa troupe, et tu es fière aussi d’avoir été jugée digne d’y servir.

« Tiens-nous au courant si les choses deviennent plus… sérieuses. Si jamais c’est le gars qu’il faut pour toi, on sera contents ; et si jamais il te fait du mal, on sera vingt-cinq pour l’écarteler et jeter les morceaux dans la lave ! » énonces-tu, mortellement sérieuse, l’approbation du reste de la compagnie se manifestant tout autour de vous par divers grognements déterminés. Tu vas quand même demander ce rapport complet sur le dénommé Tybalt. Juste par précaution. Deux tapotements sur son épaule t’indiquent que Hjalmar a certainement suivi le cheminement de tes pensées, et capitule devant l’inévitable. Tu soupçonnes qu’il a ses propres intentions d’investiguer… après tout, deux précautions valent mieux qu’une, et le petit forgeron de la Citadelle sera sûrement bientôt au service d’un prince de la Confédération.

Sur une impulsion, tu te penches à l'oreille d'Aubrée, pour que ton murmure reste strictement entre vous. « Tu sais comment ça fonctionne, oui… ? Les hommes et les femmes. Quelqu'un t'a déjà expliqué, les précautions, tout ça… ? » Certes, ce n'est ni l'endroit ni le moment. Si elle te répond oui, tu lâcheras l'affaire ; mais si elle te répond non, tu t'assureras qu'elle ait tous les éléments nécessaires à son instruction, avant votre retour à la Citadelle !

Parfois, quand tu regardes Aubrée et sa manière d’interagir avec le monde qui l’entoure, tu as un peu l’impression de voir une copie plus jeune de toi-même – une copie plus douce, plus souple, moins furieuse, moins radicale. Une femme adroite et intelligente, mais délicate et polie – une femme que tu aurais pu devenir, sans le trépas de Ljära, sans la froideur de Lidjä, sans Lide et Sithis pour abriter ton chemin et guider tes pas. Parfois, tu te demandes ce que tu aurais pu devenir si ta mère avait été la järlesse de plein droit, si tu avais été l’aînée, si tu n’avais pas été frappée de stérilité. Tu t’interroges, oui, fugacement, comme un songe, une simple rêverie occasionnelle et passagère qui ne s’attarde jamais. Mais tu ne regrettes pas. Oh non ! Tu aimes celle que tu es, le bras impitoyable de la fureur divine qui s’abat pour venger les victimes négligées ; le bouclier ferme et couturé de cicatrices qui prouvent qu’il a sauvegardé les habitants des tréfonds qu’un danger monstrueux guette perpétuellement dans l’obscurité. Tu es la princesse froide et itinérante qui papillonne sans s’attacher, et tu comprends un peu ce que ressent Aubrée, à ne pas savoir si elle aime réellement, ou si elle se l’imagine simplement, décorant de jolis sentiments une attirance plus charnelle.

Oh, elle aura le temps d’apprendre, la mignonne, à distinguer toutes ces nuances compliquées ! Elle aura le temps de devenir pleinement adulte, et tu te promets chaque jour de veiller à ce que personne ne puisse lui nuire, jamais – pour la mémoire de Ljära, et pour honorer Vigdis qui t’a offert une nouvelle sœur à préserver. Et elle rougit à nouveau, la petite Aubrée, gênée encore par ta question – le sourire discret que sa réaction te tire, tu le caches soigneusement, pour ne pas la blesser. Tu imagines bien qu’elle a déjà honoré Mirta occasionnellement, les Abysséens n’étant pas particulièrement timides dans leurs avances, mais deux précautions valent mieux qu’une, et tu préfères t’assurer qu’elle sache bien pouvoir venir te trouver si elle a des questions à poser, même si elles sont de nature… délicate. Tu préparais déjà quelques questions subsidiaires à lui glisser, mais trop tard : elle te coupe l’herbe sous le pied et contre-attaque avec une assurance qui te tire un petit rire appréciateur. Il va bien falloir que ton chaton familier se découvre des griffes, et chaque répartie est un pas de plus qu’elle accomplit vers le type de femme forte que tu l’imagines très bien devenir.

Castiel. La simple évocation de son nom évoque mille échos dans le dédale de ta mémoire, tissés de cette noirceur brûlante qui couve parfois dans les yeux du souverain cielsombrois, et tu restes silencieuse un instant, respectueuse de la myriade de souvenirs que tu attaches à son nom. Un étrange silence s’est fait derrière vous – les patrouilleurs, étrangement, ne raillent pas de leurs plaisanteries bon enfant le souvenir du polyarche. Le sourire que tu tournes vers Aubrée ne comporte aucune gêne – juste l’esquisse d’une tendresse nostalgique pour la fascinante personnalité de celui qui s’en est retourné vers son trône lointain. Ils savent bien, les hommes et les femmes de la phalange, que tu ne permettras pas le moindre affront à son encontre. « J’ai été une parfaite hôtesse pour le prince Castiel lorsqu’il est venu séjourner en Abyme avant de devenir roi, c’est vrai. Je me suis personnellement assurée qu’il se sente parfaitement le bienvenu… absolument partout. » expliques-tu avec le rire au fond des yeux. Votre aventure tapageuse n’est pas un mystère – Lidjä a bien essayé de vous marier, mais tu as refusé avec la dernière énergie, arguant de ta stérilité t’empêchant de concevoir un héritier pour ne pas être obligée de renier les tréfonds en allant t’installer en surface. « Nous sommes restés de bons amis après son départ, et je peux t’assurer que chacune de mes visites à Euphoria le voit me retourner cette hospitalité avec le même intense dévouement. » D’autant plus qu’il est chez lui en Sombreciel – et que vos soirées, si elles sont rares au gré de tes errances aux quatre coins d’Abyme, n’en sont pas moins délicieusement épuisantes. « C’est un hôte réellement charmant, et j’ai plaisir à séjourner en son palais lorsque l’occasion se présente. Il prend très à cœur ses obligations diplomatiques envers Abyme. »

Un fou rire étouffé derrière toi te signale que Hjalmar n’a rien perdu de tes multiples sous-entendus, et que les scandaleuses frasques de sa cadette avec le tout-puissant chef des voisins l’amusent plus qu’elles ne le contrarient. « Tu devrais venir avec moi, Aubrée, la prochaine fois que nos patrouilles nous mèneront de ce côté. Je suis certaine qu’il serait ravi de faire la connaissance de mon ailière, et qu’il veillerait à t’offrir un séjour enchanteur ! » La personnalité lumineuse d’Aubrée l’est d’ailleurs peut-être un peu trop pour les goûts de Castiel, d’ailleurs, qui semble partager ton amour des ténèbres ; mais peut-être saurait-il présenter à ta jeune protégée un de ses amis… ?